Oradour sur Glane

Oradour sur Glane
par ana









  
 
 







 
 

Episode tragique et horrifique de ce que fut la barbarie nazie en France, le massacre du village d’Oradour-sur-Glane est un des exemples les plus parlants du traumatisme laissé par l’occupation Allemande en France et la tuerie du plus grand nombre de civils sur le territoire français.





Oradour était un village du Limousin, très rural mais frappé par le dépeuplement de la campagne à l’aube de la seconde guerre mondiale. L’exploitation principale est alors celle des pommiers.

En 1936, 1 574 personnes vivent sur la commune dont 330 dans le village lui-même. L’économie locale s’est trouvé une voie de secours avec l’installation du chemin de fer et d’un petit tramway qui lui apporte tous les samedis les habitants de Limoges. C’est jour de marché et les produits locaux se vendent bien.

La drôle de guerre de 1940 mobilise 168 hommes dont seuls 113 reviennent après l’armistice. Pendant la guerre, Oradour est plutôt anonyme même si des résistants vivent dans le maquis avoisinant et passent par le village pour trouver de quoi manger, des contacts et si des réfugiés d’autres villages saccagés viennent y vivre, faisant monter le taux de population vivant au village à près d’un millier. L’occupation Allemande est passée plutôt inaperçue pour ces gens qui se suffisent d’être éloignés de la rumeur urbaine qui, de toute façon attire bien plus l’occupant.





Mais le 9 juin 1944, la 3e compagnie du 1er bataillon de Panzegrenadier du 4e SS Panzer Regiment Der Führer de la 2e SS Panzer Division Das Reich sous le commandement de Adolf Diekmann est au repos autour de Bordeaux, à Montauban, quand on lui ordonne de viser les maquis afin de troubler l’aide locale apportée aux Alliés.



Adolf Diekmann


Mais les Forces Françaises Libres (FFI) ne lui laissent aucun créneau pour se frayer leur chemin. En représailles, ces soldats Allemands, particulièrement fanatisés, ayant connu la dure claque de la défaite sur le front de l’Est et la lutte contre les maquisards, s’adonnent à des actes sanglants sur la population. L’idée ? Que les civils rejettent les maquisards/partisans (communistes) en les accusant d’avoir provoqué la colère de l’armée Allemande.

La ville de Tulle pourtant libérée le 8 juin par la Résistance est envahie par deux régiments de reconnaissance et 99 hommes sont pendus.

Les 9 et 10 juin, une réunion avec la Gestapo prépare dans le détail les futures exactions, à Limoges. L’après-midi du 10, les bouchers parviennent dans le bourg d’Oradour avec deux camions, un blindé et deux cents hommes armés de fusils, de grenades, de mitrailleuses… et ordonnent au garde champêtre de faire passer un ordre : la population doit se rassembler, sans exception et vite, sur la Champ de Foire avec leurs papiers d’identité. Les membres de la Résistance sont en action ailleurs, les SS entrent de force dans les maisons et obligent tout le monde à se rendre au lieu de rendez-vous, même les malades. Surveillés, groupés et menacés, les villageois obtempèrent : c’est pour une fouille du village, pour chercher des traces de leurs éventuels liens avec les résistants du maquis. Néanmoins, quelques 130 à 150 personnes se cachent ou s’enfuient, « car il fallait avoir une expérience de la peur et une motivation forte pour ne pas obéir aux ordres SS » (J.J Foucher). Les habitants des hameaux voisins les rejoignent contre leur gré. Ceux qui cherchent à s’y opposer, voulant poursuivre leur travail dans les champs sont abattus. « au fur et à mesure de leur avance, ils ont ramassé tous les habitants grands et petits, jeunes et vieux, d'Oradour pour les conduire place du Champ de Foire. Ils passaient dans chaque immeuble se trouvant dans le quartier de leur passage, défonçant portes et fenêtres si c'était nécessaire » (Mathieu Borie). La rafle concerne même les quatre écoles de la commune, 191 enfants et leurs 7 instituteurs et institutrices : c’est samedi mais il y avait une visite médicale prévue dans les écoles. La peur gagne lentement les gens qui parfois refusent d’obtempérer et des coups de feu isolés retentissent.



Intérieur des reste de l'église de nos jours..


Vers 15h, une fois tout le monde réuni, le commandant Diekmann exige du maire de savoir où se trouve la cache des munitions qu’ils gardent pour les résistants, et que chaque personne possédant une arme à feu, même pour la chasse fasse un pas en avant. Devant l’absence de réaction, l’officier demande au maire de désigner trente personnes qui seront otages tant que rien ne leur sera révélé. Le maire affirme qu’il ne peut satisfaire cet ordre, qu’aucun dépôt de munition clandestin n’existe dans le village, qu’il se porte garant pour eux. Les SS séparent les hommes des femmes, les enfants restant avec ces dernières. Les femmes et les enfants sont conduits dans l’église tandis que les hommes accompagneront les fouilles de chaque centimètre du village.

Les 180 hommes (de plus de 14 ans) sont ensuite divisés en six groupes conduits sur six lieux de fouille différents du village : garages locaux et granges. A 16h, les SS mitraillent visant, plutôt leurs jambes « nous avons perçu le bruit d'une détonation venant de l'extérieur, suivi d'une rafale d'arme automatique. Aussitôt, sur un commandement bref, les six Allemands déchargèrent leurs armes sur nous. […] En quelques secondes, j'ai été recouvert de cadavres tandis que les mitrailleuses lâchaient encore leurs rafales ; j'ai entendu les gémissements des blessés. […] Lorsque les rafales eurent cessé, les Allemands se sont approchés de nous pour exterminer à bout portant quelques-uns parmi nous » (Marcel Darthout) et leurs corps sont recouverts de fagots et de paille pour auxquels le feu est mis. Certains légèrement blessés meurent tout de même brûlés vifs. Les SS qui ne prêtent pas main forte aux exécutions pillent le village, prenant bijoux, argent, tissus, nourriture, bicyclettes, volailles, cochons, moutons, veaux ! Après s’être servis, ils mettent systématiquement le feu, partout où ils sont passés, obligeant ceux qui n’avaient pu se déplacer car trop âgés ou malades et ceux qui s’étaient cachés à mourir dans d’atroces souffrances ou à être abattus dans leur fuite. Entendant la clameur des fusils et voyant que les enfants ne rentrent pas de l’école, les habitants de faubourg qui n’avaient pas été raflés se précipitent pour trouver eux aussi la mort.


Le four à pain du boulanger du village dans lequel on a retrouvé cinq corps brûlés, une famille entière...


350 femmes et les enfants sont toujours dans l’église, certaines jeunes filles sont violées. Dans la nef, les Allemands placent une caisse volumineuse étrange, dont dépassent des cordons qu’ils enflamment. Le gaz asphyxiant qu’elle contient explose, donnant naissance à une épaisse et suffocante fumée noire.


L'église de nos jours...


Les SS commencent alors à fusiller à l’aveugle toute personne cherchant à fuir cet enfer tandis que d’autres lancent des fagots, de la paille et des chaises de bois sur les premiers corps avant d’y mettre le feu et de clore les portes du bâtiment. La chaleur devient tellement importante que la cloche fond et s’écrase au sol.

Environ 30 survivants peuvent témoigner mais seule Marguerite Rouffanche, 47 ans, née Thurmeaux a réchappé de l'église. Dans l’horreur, elle a perdu son mari, son fils, ses deux filles et son petit-fils de 7 mois. Elle est parvenu à s’extraire de cet enfer en passant par l’une des trois fenêtres dont le vitrail était brisé. Trois mètres plus bas, elle a réussi à se relever mais fut poursuivie par un SS alors qu’elle partait se cacher. Ce n’est que le lendemain, vers 17h qu’on le trouva, toujours cachée dans un champ de petits pois.

« Entassés dans le lieu saint, nous attendîmes, de plus en plus inquiets, la fin des préparatifs auxquels nous assistions. Vers 16 heures,[] des soldats âgés d'une vingtaine d'années placèrent dans la nef, près du chœur, une sorte de caisse assez volumineuse de laquelle dépassaient des cordons qu'ils laissèrent traîner sur le sol. Ces cordons ayant été allumés, le feu fut communiqué à l'engin dans lequel une forte explosion se produisit et d'où une épaisse fumée noire et suffocante se dégagea. Les femmes et les enfants à demi asphyxiés et hurlant d'épouvante affluèrent vers les parties de l'église où l'air était encore respirable. C'est ainsi que la porte de la sacristie fut enfoncée sous la poussée irrésistible d'un groupe épouvanté. J'y pénétrai à la suite et, résignée, je m'assis sur une marche d'escalier. Ma fille vint m'y rejoindre. Les Allemands, s'étant aperçus que cette pièce était envahie, abattirent sauvagement ceux qui venaient y chercher refuge. Ma fille fut tuée près de moi d'un coup de feu tiré de l'extérieur. Je dus la vie à l'idée de fermer les yeux et de simuler la mort. Une fusillade éclata dans l'église. Puis de la paille, des fagots, des chaises furent jetés pêle-mêle sur les corps qui gisaient sur les dalles. Ayant échappé à la tuerie et n'ayant reçu aucune blessure, je profitai d'un nuage de fumée pour me glisser derrière le maître-autel. Il existe dans cette partie de l'église trois fenêtres. Je me dirigeai vers la plus grande qui est celle du milieu et, à l'aide d'un escabeau qui servait à allumer les cierges, je tentai de l'atteindre. Je ne sais alors comment j'ai fait, mais mes forces étaient décuplées. Je me suis hissée jusqu'à elle, comme j'ai pu. Le vitrail était brisé, je me suis précipitée par l'ouverture qui s'offrait à moi. J'ai fait un saut de plus de trois mètres, puis je me suis enfuie jusqu'au jardin du presbytère. Ayant levé les yeux, je me suis aperçue que j'avais été suivie dans mon escalade par une femme qui, du haut de la fenêtre, me tendait son bébé. Elle se laissa choir près de moi. Les Allemands alertés par les cris de l'enfant nous mitraillèrent. Ma compagne et le poupon furent tués. Je fus moi-même blessée en gagnant un jardin voisin ». Voilà pour les négationnistes allemands…!


L'église à ciel ouvert...


Aux alentours de 18h, un ingénieur des chemins de fer, Jean Pallier arrive en camion au village (une rame de tramway n’est jamais revenue de son aller vers Oradour, les trois hommes y travaillant sont morts, un abattu, deux raflés et tués avec les autres). « Au sommet d’une côté, nous avons pu apercevoir que le bourg n’était plus qu’un immense brasier ». Il est arrêté avec ceux qui l’accompagnent, fouillé et autorisés à rester sur place. Jean Pallier tente de rallier la rame de tramway à pied, à travers champs et constate que tout le bourg est cerné par des soldats en armes. Il est arrêté avec ses compagnons mais une vérification d’identité suffit et ils sont relâchés vers 20h avec ordre de s’éloigner du village. A 22h 30 les Allemands sont partis, non sans avoir vidé quelques bonnes bouteilles trouvées dans Oradour, à la santé de leur instinct meurtrier, et pris les véhicules des villageois !




Le lendemain, Jean Pallier est sans doute le premier français à pouvoir entrer dans Oradour, avec quelques hommes, « Tous les bâtiments y compris l'église, les écoles, la mairie, la poste, l'hôtel que ma famille habitait, n'étaient plus que ruines fumantes. […] En tout et pour tout, nous n'avions aperçu que trois cadavres carbonisés en face d'une boucherie et un cadavre de femme non carbonisé, mais tuée d'une balle dans la nuque […]Au milieu d'un amas de décombres, on voyait émerger des ossements humains calcinés, surtout des os de bassin. Dans une dépendance de la propriété du docteur du village, j'ai trouvé le corps calciné d'un enfant […] Je vis plusieurs charniers […] Bien que les ossements fussent aux trois quarts consumés, le nombre de victimes paraissait très élevé […] Il n'est pas de mots pour décrire pareille abomination. Bien que la charpente supérieure de l'église et le clocher soient entièrement brûlés, les voûtes de la nef avaient résisté à l'incendie. La plupart des corps étaient carbonisés. Mais certains, quoique cuits au point d'être réduits en cendres, avaient conservé figure humaine. Dans la sacristie, deux petits garçons de douze ou treize ans se tenaient enlacés, unis dans un dernier sursaut d'horreur. Dans le confessionnal, un garçonnet était assis, la tête penchée en avant. Dans une voiture d'enfant reposaient les restes d'un bébé de huit ou dix mois. Je ne pus en supporter davantage et c'est en marchant comme un homme ivre que je regagnai [le hameau des Bordes] »



Le 12 juin, le détachement SS revient sur les lieux pour enterrer les corps et rendre toute identification impossible, pratique usuelle du front de l’Ets visant à masquer leurs boucheries. « J'ai personnellement déblayé l'église. […] je portais des gants pour cette besogne. Je prenais les cadavres et les restes, les sortais de l'église et les mettais dans un tombeau creusé à cet effet. Pendant ce travail, une ligne de sentinelles était en position […] et tirait sur les civils qui s'approchaient de la forêt « (sergent SS Boos).


Un des puits du village où furent retrouvés des corps impossibles à identifiés tant ils étaient décomposés...


642 personnes furent ainsi massacrées pour le seul plaisir de revanche de quelques soldats en manque d’action et de sang.

Oradour sur Glane ne fut pas le seul village à subir de telles horreurs (il y a eu également les tristes cas de Marzabotto et de Distomo) mais il reste le témoin indiscutable d’une sauvagerie ignoble. Aujourd’hui, le village est reconstruit mais les ruines nées de ce jour sont restées en l’état et témoignent encore, des années après la mort des quelques survivants. Et croyez-moi, lorsque l’on pénètre dans ce village fantôme, on ressent quelque chose d’unique, d’indescriptible.

Sources : Wikipédia, Google images, oradour souviens toi.com.





 
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