3 royaumes (Les) - histoire

3 royaumes (Les) - histoire
par ana









  
 
 







 
 





Images du film de John Woo "les trois royaumes".


Les trois royaumes cela sonne comme une légende n’est-ce pas ?



Et bien tout simplement parce que c’est un passage de l’histoire chinoise qui se raconte de nos jours comme un grand récit épique gavé de héros qui se sont battus contre la tyrannie. On en connaît le mythe grâce aux écrits de Luo Guanzhong, Chen Shou et Pei Shongzhi qui se sont succédés à la mise en forme d’un récit cohérent d’après les notes de ceux qui l’avaient vécu. Ensemble, ils ont donné naissance aux « Chroniques des trois royaumes » ( « Sanguo Zhi »).





Début du 2e siècle après J-C. La dynastie Han est moribonde. Autrefois puissante, elle succombe lentement aux luttes intestines orchestrées par la corruption et les ambitions des nobles et des proches du pouvoir. Le palais impériale est plein de cette tension qui oppose les Eunuques, la noblesse et l’autorité impériale.

"Qu’est-ce que les Eunuques viennent faire là dedans ?" me demanderez-vous…


Et bien sachez que les Eunuques étaient une caste à part de la population non seulement parce qu’ils acceptaient l’ignoble castration mais surtout parce que ce sacrifice leur assurait l’obtention de charges très importantes auprès du l’empereur, charges qui faisaient souvent d’eux des hommes riches et influents, parfois plus encore que le premier ministre en place. Leur castration n’avait pour but que de s’assurer leur fidélité puisque, sans descendance, aucun intérêt de chercher à créer sa propre dynastie et de faire un coup d’état… Enfin, en principe. Car les Eunuques avaient le droit d’adopter….



Puisque l’empereur Han se montre incapable de tenir en laisse ses seigneurs et ses Eunuques, la Chine est le théâtre de leurs conflits armés et la première victime en est le petit peuple. Celui-ci se tourne vers une secte religieuse « La Voix de la Paix » pour obtenir protection. Un anti-impérialisme se répand et le grand prêtre de « La Voix de la Paix » prône que les temps sont venus pour un nouveau règne, celui de « La Voix de la Paix ». A cette fin, il recrute des guerriers et organise une force militaire dévouée à sa cause : ce sont les Turbans Jaunes (chaque soldat porte une étoffe jaune). Ils sont si nombreux qu’ils font battre en retraite l’armée impériale !

Les chefs militaires de la cour impériale lèvent donc une armée plus grande, recrutant des « volontaires », souvent d’anciens bandits, mercenaires etc… Mais un homme digne de tous les éloges répond présent : Liu Bei.



Liu Bei version moderne...



C’est un frère d’armes des généraux impériaux et un parent éloigné de la couronne, il jure de rétablir la dynastie Han dans toute sa légitimité. Dans le même temps, Cao Cao, fils adoptif d’un Eunuque qui cherche à briller par les armes, remporte plusieurs victoires grâce à la cavalerie impériale. L’armée impériale renaît et enchaîne les succès.

Bien que la victoire sur les « Turbans Jaunes » soit écrasante, elle est coûteuse en hommes : de tous les grands généraux engagés dans cette lutte, il ne reste que Cao Cao et Liu Bei. D’un autre côté, le peuple est déçu et son appétit de révolte demeure. Le chaos règne toujours sur la Chine des Han lorsque l’empereur décède.



Cao Cao à un âge vénérable....



Des assassinats de successeurs au trône sont organisés par les Eunuques. Les troupes investissent le palais impérial pour les éliminer. Les Eunuques tentent d’enlever le tout jeune nouvel empereur dans leur fuite, occasion saisie par le gouverneur du Hedong, Dong Zhuo qui, se faisant passer pour son sauveur, évince le souverain pour placer son frère de 9 ans sur le trône et s’auto-proclamer premier ministre. La tyrannie s’installe.

Les seigneurs ne sont pas dupes et enragent au moins autant que le petit peuple… Cao Cao tente de faire assassiner le tyran mais échoue. Il appelle alors des alliances pour le renverser. Des seigneurs, des chefs de guerre, Liu Bei et ses généraux, tous répondent présents. Mais cette armée alliée va devoir faire face à l’exceptionnel Lü Bu, un guerrier déjà légendaire. Les affrontements se succèdent, les ruses et les coups du sort aussi (manque de vivres, duel entre généraux) mais les forces commandées par Liu Bei finissent par faire la différence.



Les trois royaumes tels qu'ils existaient alors et furent ensuite indépendants les uns des autres : Wu (su), Wei (nord) et Shu (l'ouest).



Lü Bu subit revers sur revers, il se replie et choisit une autre tactique : faisant croire à une filiation entre lui et Liu Bei, il prend le contrôle de son château et de ses terres. Dépité mais soucieux du bien être du peuple vivant dans la région, Liu Bei se résout à servir Lü Bu une fois rentré. Pourtant, il décide d’agir et demande l’aide de Cao Cao qui accepte volontiers. Les choses tournent mal car les tactiques des deux alliés sont mises à nue par leur ennemi. Le siège est donc fait du château et Cao Cao détourne même les rivières avoisinantes pour l’inonder. Lü Bu bout, enlisé dans cette situation, il en devient fou et ses agissements meurtriers au sein de son propre clan détériorent rapidement ses relations avec ses hommes. La trahison est alors une séductrice et Lü Bu est vaincu. Cao Cao sort de ce conflit plus puissant encore mais Liu Bei choisit de ne pas le suivre. Il tient à sa liberté.





Liu Bei est un seigneur sans terre aussi prête t-il sa force à son cousin Liu Biao en devenant le gardien de ses frontières. Pendant ce temps, Cao Cao s’est déjà trouvé un autre adversaire… Mais la puissance de l’armée du conquérant est telle qu’il entre bientôt en possession de tout le royaume du nord, accueillant même le jeune empereur qu’il fait ainsi revenir d’exil. Mais le très jeune homme devient sa marionnette. Liu Biao succombe à la maladie en 208. Son héritier est dépassé par la crainte et se rend rapidement aux prétentions territoriales de Cao Cao dans l’ouest. Furieux, Liu Bei prend les choses en main : il refuse de laisser le peuple entre les mains du tyran. Mais s’il est entouré de grands généraux qui ont tous fait leurs preuves, Liu Bei sait qu’il ne peut rivaliser en terme de quantité d’hommes. Il est sans cesse repoussé plus loin vers le sud, ralenti par les civils qui le suivent et Cao Cao s’enfonce dans le royaume de l’Ouest, y installant sa domination au nom de l’empereur. Heureusement, Liu Bei a rencontré un stratège très habile qui s’est mis à son service, Zhuge Liang (qui s’écrit aussi Gong Min).



Zhuge Liang, une légende


Celui-ci le convainc que leur seule chance est de proposer une alliance au royaume du sud, le seul encore épargné par les ambitions du premier ministre. Les deux armées ainsi réunies seraient de force à se mesurer à Cao Cao.

Mais leur route vers le Sud est chaotique : un exode civil massif les ralenti, l’armée de Liu Bei ne compte que 5000 hommes et le seigneur est subitement séparé de sa famille aux abords de la ville de Chang Ban. Son général Zhao Yun part seul pour retrouver la femme et le fils de son seigneur. Il affronte en solitaire de nombreux soldats ennemis mais parvient à sauver l’enfant qu’il rapporte sain et sauf à Liu Bei. De leur côté, les généraux Zhang Fei et Guan Yu font bloc pour empêcher les forces de Cao Cao d’enfoncer leurs lignes et de massacrer les civils. La débâcle est fatale mais beaucoup de civils doivent la vie à la résistance armée de l’armée de Liu Bei.



Guan Yu, le seigneur de la guerre par excellence!


Profitant d’un bref répit, Liu Bei campe enfin au Sud, laissant son stratège solliciter l’aide de Sun Quan, l’hériter en titre du royaume du Sud. Il est bien plus jeune que Liu Bei mais il a l’audace et ne craint pas de s’engager dans un conflit contre le légendaire Cao Cao. Il se doute que lorsque le tyran en aura terminé avec sa conquête de l’Ouest, il se tournera vers son pays. S’il est facile de convaincre Sun Quan, cela l’est moins avec les conseillers qui veulent à tout prix éviter la guerre. Mais Zhuge Liang présente les choses de telle façon (l’orgueil de Cao Cao le mènera à sa perte dans un pays qu’il méconnaît, ses troupes sont épuisées et le climat les affaiblira plus encore, ces mêmes troupes ne sont motivées que par la peur car ce sont d’anciens prisonniers) que l’union est scellée.



Sun Quan



Il est temps : Cao Cao a extorqué à l’empereur l’autorisation de frapper le traître Liu Bei et ceux qui le cacheraient. Il est déjà en train de descendre vers le Sud par le Yang Tsé avec toute sa flotte.



Image du film de John Woo "les trois royaumes"


Sun Quan confie le commandement à son lointain parent et aîné Zhou Yu, un chef de guerre expérimenté qui choisit de camper l’armée sur les flancs de la Falaise rouge, entre le fleuve et le relief ; de sorte qu’on ne puisse les attaquer que de face. A son arrivée, Cao Cao fait une erreur fatale : il poste ses navires sur la rive opposée, dans un goulot du fleuve. Mais Zhou Yu et Zhuge Liang ne sont pas trop de deux pour élaborer un plan : l’armée impériale de Cao Cao dépasse de loin celle de ses adversaires (550 000 face à quelques 70 000 maximum).





Tous les moyens sont bons : ils conspirent pour faire accuser l’un des meilleurs généraux de Cao Cao de traîtrise. Ce denier est exécuté. Dans le même temps, un assaut de cavalerie impériale est repoussé suivant une tactique ancestrale mais efficace, celle de la formation en trigrammes ou de la tortue qui emprisonne l’adversaire et le laisse à la merci de l’ennemi. Mais cette victoire n’ébranle pas Cao Cao. Zhuge Liang met au point deux autres stratégies : espionnage du campement de Cao Cao (il apprend ainsi que les bateaux sont enchaînés les uns aux autres pour soulager le mal de mer des soldats et qu’une épidémie mortelle se répand parmi les troupes impériales épuisées) et vol de matériel (la récupération des deux tiers de stock de flèches ennemies par le truchement de fausses cibles sur le fleuve est une légende). L’idée de Zhuge Liang et Zhou Yu est d’attaquer de toutes parts et surtout de réduire à néant la menace de la flotte. Le fait que les bateaux soient liés entre eux est une chance : ils peuvent utiliser le feu pour les réduire à néant. Néanmoins, le vent souffle vers le Sud et serait donc fatal car il retournerait le feu contre eux. Zhuge Liang use de sa science des astres et du ciel pour prédire quand le vent tournera. Les forces de Liu Bei font semblant de déserter leur allié pour mieux revenir le moment venu et attaquer Cao Cao par les flancs.



Une nuit, un des seigneur de la guerre de Zhou Yu fait croire à sa reddition et gagne donc paisiblement les bateaux ennemis avec ses soldats. Une fois proche d’eux, ils mettent le feu. La surprise est totale et l’alignement forcé des bateaux de Cao Cao dans le goulot de la falaise encourage le feu à se propager très rapidement : grâce à l’instinct de Zhuge Liang, l’assaut a été lancé alors que le vent venait de tourner. Tout brûle et tue beaucoup de soldats qui vivaient à bord. Simultanément, profitant de l’effet de surprise, le reste des forces de Liu Bei et Suan Quan font des percées dans le campement de Cao Cao. La tuerie dure toute une nuit jusqu’à ce que Cao Cao se retrouve seul face à ses adversaires et accepte sa défaite sous la menace de se faire tuer à son tour.



Inscriptions commémoratives à la Falaise Rouge



Cette défaite fut telle et les pertes humaines si nombreuses que Cao Cao en perdit définitivement son pouvoir. Il tenta de nouvelles percées dans le Sud mais échoua à chaque fois, les mêmes adversaires s’acharnant à lui barrer le passage. En 214, la Chine fut divisée en trois royaumes équilibrés, chacun respectant les frontières de son voisin. Malheureusement, si cette solution a évincé Cao Cao dont la descendance sera systématiquement éloignée du pouvoir, elle fut temporaire. L’équilibre ainsi installé reposait sur la personnalité forte de ses dirigeants qui finirent par se retourner l’un contre l’autre (surtout Liu Bei et Sun Quan). Une fois leur mort arrivée, l’ensemble de la Chine sombra de nouveau dans un déclin qui mit un terme à la dynastie Han. Les successeurs se révélèrent des tyrans ou des faibles. Les conflits permirent à la dynastie Jin de prendre le pouvoir suprême.



Pour les passionnés : « Des trois royaumes aux Jin : légitimation du pouvoir impérial en chine au 3e s » de Damien Chaussende (étude historique) chez Belles lettres

« Les trois royaumes », sept tomes de Luo Guan Zhong chez Flammarion




Sources : Wikipédia, Google images, sites internet sur la Chine.

 
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